Si vous aviez ouvert votre journal quotidien 103 ans plus tôt, vous seriez tomber sur une drôle de publicité. Publiée dans Le Journal de Genève du 16 janvier 1920, la réclame du Thermogène vante un médicament qui « guérit en une nuit » de nombreux maux.
La Ouate Thermogène est l’invention d’un pharmacien bruxellois, Charles Vandenbroeck. Créée en 1896, elle a vite été commercialisée dans le monde entier. La première publicité du Journal de Genève sur ce produit date de 1905. On pouvait lire ces lignes :
La Ouate Thermogène est un remède souverain contre toutes les douleurs musculaires, les rhumatismes, les rhumes et bronchites, les maux de gorge, les points de côté, les torticolis, les lumbagos et toutes les affections qui ont le froid pour origine.
Si l’on veut une réaction prompte et énergique, on aspergera la feuille d’ouate soit de vinaigre, soit d’un peu d’eau tiède salée.
En 1906, les publicités ajoutent :
Guérit en une nuit les rhumatismes, bronchites, maux de gorge, maux de reins, points de côté, torticolis, etc.
Selon la définition de son fabricant, c’est une ouate de qualité supérieure. Sur celle-ci, on applique un végétal exotique, avec des principes actifs qui luttent contre les refroidissments. Elle engendre de la chaleur, et s’applique sur les zones douloureuses.
Le Thermogène connaît vite un succès retentissant. La Première guerre mondiale ne stoppe pas ses élans. De nouvelles publicités incitent les épouses et mères à en envoyer aux soldats. Durant l’entre-deux-guerres, le Thermogène est l’un des produits phares des pharmacies européennes.
C’est un tampon de ouate, teinté par un colorant rouge (l’éosine). Il est parfumé de baume du Pérou et de bois de santal. Mais sa spécificité, c’est d’être imbibé de Capsicum frutescen, le piment avec lequel on fait du Tabasco. D’où l’impression de chaleur du produit….
Au début du XXe siècle, une nouvelle mascotte est créée pour le Thermogène. Elle est dessinée par Leonetto Cappiello, dessinateur et affichiste parisien. Il s’agit d’un Pierrot, descendant de la lune et portant de la ouate. Certaines publicités lui rajoutent même un poème :
Un jour Pierrot sentant aux poumons une gêne,
Bien vite s’appliqua la Ouate Thermogène.
L’effet fut surprenant, et notre ami Pierrot
Vit des gerbes de feu jaillir de son goulot.
Cette image devient indissociable de la marque, et la mascotte porte alors le nom de «Pierrot crachant le feu».
Le succès du Thermogène s’observe aussi dans le nombre de contrefaçons du produit. Beaucoup de publicités mettent en garde les consommateurs sur leur existence. La présence de l’image du Pierrot crachant le feu devient gage de la véracité du produit.
Durant et après la Seconde guerre mondiale, le Thermogène tend à disparaître. Désormais désuet, il est remplacé par de nouveaux procédés et médicaments.
Vous voulez lire un autre article sur une ancienne publicité?
Journal de Genève, éditions des 09.03.1905, 19.01.1906, 26.11.1912, 22.10.1913, 18.11.1913 et 16.01.1920.
Sill, Édouard. « Le Thermogène, histoire d’un étrange remède enflammé », Retronews, 07.11.2022. UREn ligne ici.
Journal de Genève, sur https://letempsarchives.ch/advSearch