Jouet au succès immédiat, l’ours en peluche a aujourd’hui plus de 100 ans. Deux histoires se partagent son origine : une en Allemagne, l’autre aux États-Unis. Le Teddy Bear, comme on l’appelle alors depuis 1903, est un exemple de simultanéité d’invention.
L’ours est une figure présente dans de nombreuses religions anciennes, un peu partout dans le monde. Symbole de puissance et de renouveau, il est souvent considéré comme le double de l’homme. Il est même le symbole de plusieurs villes d’Europe, comme Berlin ou Berne, dont les noms dérivent du mot ours. Roi des animaux, le lion finit par le détrôner au XIIe siècle. C’est notamment l’Eglise qui en fait une figure mauvaise, voire diabolique, afin de donner une image négative des cultes et rites qu’elle définit comme païens.
L’ours redore un peu son blason lors de l’époque victorienne. Devenu la star des zoos, il est montré comme un divertissement. Il acquiert donc un nouveau statut, celui de l’amusement. Cette nouvelle image amène petit à petit la création d’objets sculptés à son effigie, pour la décoration ou les jeux d’enfants. C’est de cette nouvelle popularité que découle l’invention de l’ours en peluche, qui apparaît simultanément en Allemagne et aux États-Unis au début du XXe siècle.
Née en Allemagne en 1847, Margarete Steiff commence sa vie professionnelle en tant que couturière. Grande entrepreneuse malgré sa santé fragile (elle est atteinte de la polio), elle fonde en 1877 une petite entreprise de feutre avec plusieurs couturières. En 1880, elle a l’idée de créer un coussin d’aiguilles en forme d’éléphant. Véritable succès, surtout auprès des enfants, elle crée ensuite d’autres animaux.
Son neveu Richard Steiff la convainc de fabriquer un ours en peluche. Il lui montre des croquis d’ours, qu’il a dessiné au zoo de Stuttgart. Ce nouveau jouet est un ours articulé en peluche de mohair. Il porte parfois un petit ruban autour du cou, qui accentue son côté anthropomorphique.
L’ours de Steiff connaît un succès mitigé, avant d’être présenté à la Foire du jouet de Leipzig en 1903. C’est alors un véritable triomphe, et les commandes affluent de partout dans le monde. Appelé l’ours PB55 (pour ours en peluche (Plüsch) mobile (Beweglich), de 55 cm), c’est grâce aux peluches américaines qu’il prendra le surnom de Teddy Bear, comme tous les autres ours en peluches.
Le nom de Teddy Bear a une origine singulière, puisqu’on la doit à Théodore Roosevelt. Le président américain, grand amateur de chasse se rend dans le Mississippi en novembre 1902 à cause d’un conflit sur le tracé de la frontière entre cet état et la Louisiane.
Invité à une partie de chasse, lui et ses compagnons repartent bredouille. Afin de ne pas rentrer les mains vides, des rabatteurs lui proposent d’abattre un ourson blessé et attaché à un arbre. Outré par cette proposition, Roosevelt refuse et libère l’animal.
Les journaux s’emparent vite de cette histoire, et une caricature du célèbre dessinateur Clifford Berryman (qui suivait le président à une époque où la photographie n’était pas aussi démocratisée qu’aujourd’hui) pour le Washington Post immortalise l’anecdote.
La caricature fait le tour du pays. Morris Michtom, un émigrant russe de Brooklyn qui tient une boutique de confiseries et de jouets, a l’idée de commercialiser dès 1903 un ours en peluche. Avec la permission du président, il le nomme Teddy Bear, en souvenir de cette histoire (Teddy étant le surnom de Roosevelt). Ce nom accentue le succès de ce jouet, qui connaît des ventes fulgurantes dès sa sortie.
Du Moyen âge à l’époque contemporaine, l’ours est un animal très présent dans la littérature, surtout dans les contes et les histoires pour enfants. Jean de l’Ours, le Livre de la jungle, ou Boucle d’or ne sont que les exemples les plus connus parmi tant d’autres.
Dès l’apparition du Teddy Bear, c’est l’ours en peluche qui devient un personnage de littérature enfantine. Dès 1926, Alan Alexander Milne écrit les histoires de Winnie l’ourson. Dans les années 1950, on voit apparaître Paddington et Colargol dans les livres d’enfants. Ils continuent ensuite leurs aventures à la télévision, avec l’arrivée des dessins animés. Aujourd’hui encore, l’ours en peluche est un des jouets préférés des enfants, avec près de 6 milliards d’ours créés chaque année.
Mots-clés: Anecdotes historiques; Animaux; Jeux
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Pastoureau, Michel. Les animaux célèbres. Paris, Arléa, 2001.
Skjellaug, Aïna. « Teddy bear, nommé d’après le président Theodore Roosevelt ». Le Temps, 22.12.2020. En ligne ici.
Images 1, 2 et 5 : Photographies de l’auteure
Image 3 : Pixabay
Image 4 : Caricature de Clifford Berryman dans The Washington Post du 16 novembre 1902. Domaine public, Wikipedia Commons.