Sur le chemin de l'histoire

L’histoire de Genève à travers ses noms de rues

En passant vers le lac

Mythes suisses

Comme l’histoire de Remus et Romulus à Rome, ou celle de Vercingétorix en France, la Suisse possède elle aussi ses mythes fondateurs. Ancrés dans l’imaginaire collectif, ils se reflètent dans les rues, les monuments et les légendes orales. Parmi les mythes suisses, on retrouve en premier lieu le serment du Grütli et le personnage emblématique de Guillaume Tell.

Les mythes fondateurs de la Suisse

Les mythes suisses relatent des histoires se passant au XIVe siècle. Ils sont mis par écrit pour la première fois dans le Livre blanc de Sarnen. Il s’agit d’un manuscrit de 1470 sur les premiers Confédérés suisses. On y retrouve les exploits de Guillaume Tell, d’Arnold Winkelried, et d’autres évènements de la même époque. Parmi eux, le serment du Grütli de 1307 (considéré jusqu’au XIXe siècle comme l’acte fondateur de la Suisse) et la destruction des châteaux (un acte de révolte paysanne suisse vis-à-vis de la domination des Habsbourg et de leurs baillis) occupent une place de choix. Ces mythes ont ensuite été largement diffusés dès le XVIe siècle par les textes, les images, puis par le théâtre, le cinéma et la construction de monuments patriotiques.

Histoire des mythes fondateurs suisses

Le plus célèbre héros suisse

Dépeint comme un homme honnête et modeste, Guillaume Tell est la parfaite image de l’homme héroïque. Selon la légende, Hermann Gessler, bailli au service des Habsbourg, fait ériger un mât à Altdorf, sur lequel est posé son chapeau. Les habitants doivent saluer ce chapeau de la même manière que s’il s’agissait du bailli, en s’inclinant. Guillaume Tell refuse. Gessler le condamne à tirer un carreau d’arbalète dans une pomme posée sur la tête de Walter, son fils. Tell réussit, mais Gessler se pose des questions sur le deuxième carreau d’arbalète caché sous sa tunique. Tell lui répond qu’en cas d’échec, il lui aurait servi à transpercer le cœur du bailli. 

Gessler l’arrête et le fait mener à Brunnen. Le prisonnier traverse le Lac des Quatre-Cantons, mais arrivé à terre, il saute de la barque et lui donne un violent coup de pied. L’embarcation est repoussée, et Tell s’enfuit. C’est à cet endroit et en son honneur que la chapelle de Tell est érigée en 1388, selon la légende. Par la suite, Guillaume Tell tue Gessler d’un carreau d’arbalète en plein cœur dans un chemin creux entre Küssnacht et Immensee.

Histoire des mythes fondateurs suisses

Bataille légendaire

Les noms de rues de Genève commémorent un autre héros mythique suisse, Arnold Winkelried. La légende a retenu son sacrifice lors de la bataille de Sempach contre les Habsbourg en 1386. Durant cette bataille qui oppose les Confédérés aux Habsbourg, les Suisses n’arrivent pas à percer les lignes ennemies. Arnold Winkelried se serait alors saisit d’une poignée de lances habsbourgeoises et se serait laissé empalé volontairement. Son sacrifice a créé une brèche dans les troupes, permettant aux Confédérés de remporter la victoire. Sa légende est probablement née d’un besoin de renforcer le sentiment fédérateur au sein des alliances suisses. Elle a ensuite été largement réutilisée comme exemple de sacrifice au nom de la liberté, notamment au XXe siècle.

Histoire des mythes fondateurs suisses

Genève, la Suisse, Tell et Winkelried

Il est intéressant de noter que les rues Guillaume-Tell et Arnold-Winkelried se trouvent très proches l’une de l’autre. Elles ont été nommées ainsi en 1834, suite à de nombreux désaccord sur les noms de rues à Genève. À cette époque, la rive droite subit de nombreux changements architecturaux et plusieurs immeubles voient le jour. Il faut donc nommer de nouvelles rues, et tout le monde n’est pas d’accord. La ville se modernise et l’idée de donner aux rues des noms de personnalités anciennes ne fait pas l’unanimité. Les autorités arrêtent des noms comme la « place du Quai-des-Bergues », la « rue du Pont-des-Bergues » ou la « rue de la Place-du-Quai-des-Bergues ». 

Cette nouvelle dénomination fâche le Conseil municipal. Jean-Jacques Rigaud propose de nommer ces rues « Guillaume-Tell » et « Arnold Winkelried » pour ancrer Genève dans la Suisse, qu’elle a rejoint quelques années auparavant. C’est ainsi que les héros suisses se sont mêlés aux personnalités et légendes genevoises dans les rues de la ville.

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Bibliographie

Capitani, François. « Tell, Guillaume », Dictionnaire historique de la Suisse (DHS), version du 17.12.2013, traduit de l’allemand. URL: https://hls-dhs-dss.ch/fr/articles/017475/2013-12-17

Kaiser, Peter. « Mythes fondateurs », Dictionnaire historique de la Suisse (DHS), version du 03.08.2009, traduit de l’allemand. URL : https://hls-dhs-dss.ch/fr/articles/017474/2009-08-03/

Kuntz, Joëlle, « Guillaume Tell, un héros dans l’impasse », Le Temps, 29.01.2016.

Waser, Andreas. « Winkelried, Arnold », Dictionnaire historique de la Suisse (DHS), version du 17.12.2013, traduit de l’allemand. URL :  https://hls-dhs-dss.ch/fr/articles/024437/2013-12-02/

Images

Image 1 : Pixabay

Image 2 : Jean Renggli, Le serment du Grütli, 1891. Domaine public, Wikipedia Commons

Images 3 et 4 : photographies de l’auteure

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