Sur le panneau de la rue Gambini, on peut lire «Homme de lettres italien, réfugié à Genève». Un résumé bref pour une vie bien remplie. Chanoine, révolutionnaire, professeur de droit et de lettres qui se réfugie à Genève avant de se convertir au protestantisme… Gambini n’a pas eu le temps de s’ennuyer!
Giovanni Gambini naît en1761 à Catane, en Sicile. Il étudie le droit très tôt, obtient son doctorat à 16 ans, et décroche peu après son brevet d’avocat. Il souhaite enseigner à l’université de Catane, une institution de longue date fondée en 1434. Cependant, elle est dirigée par l’Eglise.
Pour y devenir professeur, Gambini devient alors chanoine. En parallèle de son enseignement, il a de nombreuses lectures. La plupart sont clandestines: Montesquieu, Rousseau et Voltaire sont en effet des auteurs censurés à la fin du XVIIIe siècle. Influencé par leurs écrits, Gambini rejoint peu à peu les idées du christianisme social, tel que Rousseau le décrit dans la Profession de foi du vicaire savoyard.
Ces idées l’amènent à adhérer à l’idéologie de la Révolution française qui se répand en Europe. Pour cela, il est arrêté et incarcéré de 1793 à 1797.
Après sa libération, il s’expatrie et part pour le nord de l’Italie. Il se fait engager comme secrétaire et interprète au sein de la République cisalpine (un état satellite créé par Napoléon en 1792 en Italie). Cette République évolue : elle devient la République italienne, puis le Royaume d’Italie. Gambini y gravit les échelons, jusqu’à être nommé chef du cabinet du ministre de la Justice. Il est entre autres chargé de traduire le «Code Napoléon» en italien.
En 1809, il est promu juge à la Cour d’appel de Venise. Cependant, lorsque la ville retombe sous domination autrichienne en 1814, Napoléon destitue Gambini qui se retrouve seul, persécuté et obligé de fuir…
Gambini trouve refuge à Genève en 1814. Dès 1822, il enseigne la littérature italienne au Musée académique, une jeune institution née 2 ans auparavant. Contrairement à d’autres émigrés italiens de son époque, Gambini renonce à toute activité politique.
Il s’intègre dans la société genevoise en achetant sa bourgeoisie, comme de nombreux autres réfugiés. Il paye 2500 florins pour l’obtenir.
Gambini passe alors ses dernières années à Genève, où il se convertit à la religion réformée. Le protestantisme, tel qu’il est alors pratiqué à Genève, correspond plus à ses aspirations personnelles que la religion catholique pratiquée à Catane. Il se marie, et écrit ses Mémoires pour son fils à l’âge de 76 ans. Il meurt ensuite 5 ans plus tard, en 1842.
Mots-clés: Histoire Suisse et genevoise; Noms de rues
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Bibliothèque de Genève, Manuscrits et archives privées. Papiers Giovanni Gambini, CH BGE Ms. fr. 1531-1535. Inventaire du fonds en ligne.
Van Bever, Pierre. «Castiglione (T. R.). Giovanni Gambini, « rousseauista » siciliano fra illuminismo e romanticismo ». Revue belge de philologie et d’histoire, tome 35, 1957. pp. 101-102. En ligne ici.
Vellas, Christian. Les rues qui racontent Champel-Florissant. Genève, Slatkine, 2012.
Image 1: Photographie de l’auteure
Images 2 et 3 : Bibliothèque de Genève, Papiers Giovanni Gambini