Entre les années 1930 et 1940, des expositions un peu particulières se sont organisées à la Place du Port, en plein air. Les artistes, pour faire face à la crise qui touche Genève, échangent leurs tableaux à leurs clients contre divers biens matériels…
Dans les années 1930, Genève est touchée par la crise économique mondiale. Certains secteurs d’activités se maintiennent, mais le taux de chômage est très élevé. Parmi les domaines qui subissent cette crise, on retrouve notamment les artistes.
Pour faciliter leurs activités et la vente de leurs tableaux, les artistes genevois se regroupent en plusieurs associations, qui existaient pour la plupart avant 1930. Parmi elles on trouve l’Association syndicale des peintres, sculpteurs, dessinateurs et artisans d’art du canton de Genève. Fondée en 1922 par Albert Schmidt, elle a son siège au Musée Rath. Elle œuvre pour faire connaître ses membres et leurs talents au grand public, et aide aussi les artistes à acquérir leur matériel à moindre prix.
L’Association syndicale participe aussi à de nombreuses manifestations hors du musée. Parmi ces évènements se trouve les «expositions-troc» organisées depuis 1934.
La première mention d’une «exposition-échange» à Genève date de 1934. Organisée par plusieurs artistes genevois à la place du Port, elle se déroule en plein air. On y retrouve les œuvres de nombreux artistes genevois de l’époque : Eugène Martin, John Torcapel, Paul Mathey ou encore Claire-Lise Monnier.
Les expositions se déroulent tous les ans à la Place du Port ou à Longemalle. Elles connaissent un certain succès, et attirent une foule de curieux. Elles atteignent un nombre de visiteurs supérieur aux expositions du musée Rath, selon les journalistes de l’époque. À chaque fois, plusieurs dizaines de peintres y participent et c’est l’Association syndicale qui l’organise dès 1937.
Les «Expos-troc», comme elles s’appellent dès 1936, continuent durant la guerre afin de permettre aux artistes de vendre leurs œuvres lorsque d’autres difficultés financières et d’approvisionnement remplacent la crise. Elles cessent ensuite durant les années 1950.
Si certaines toiles s’échangent contre des espèces, le principe de ces expositions est d’obtenir directement certains biens. Les commerçants genevois peuvent ainsi acquérir des toiles contre des biens de première nécessité (nourriture, vêtements, etc.).
Cependant, les artistes troquent aussi leurs tableaux pour des biens plus conséquents. Comme un tapis, un vélo, une machine à écrire, une cuisinière… Les échanges de services, avec un coiffeur ou une blanchisseuse sont aussi appréciés.
Enfin, d’autres demandes sortent de l’ordinaire, avec des trocs contre des montres anciennes, des produits pharmaceutiques, un piano…et même un séjour de vacances ! Tant que tout le monde est heureux et satisfait au bout du compte…
Mots-clés: Anecdotes historiques; Histoire Suisse et genevoise
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La Suisse, éditions des 11.06.1936, 11.09.1938 et 04.06.1939.
Journal de Genève, éditions 30.06.1934, 25.09.1943 et 01.11.1944.
Image 1. Pixabay, utilisation libre
Image 2. Place Longemalle, 1908. Domaine public, Wikimedia Commons
Image 3. Alexandre de Spengler, peintre genevois (1893-1973) ayant participé aux expositions troc. Photographie de Frédéric de Spengler (1866-1944), date inconnue. Domaine public, Wikimedia Commons