Parmi mes sujets historiques préférés, les origines des noms de rues ont une place de choix ! Et je ne suis apparemment pas la seule ! Parmi les toponymes genevois intrigants, on retrouve la rue Chantepoulet. Pourquoi une telle appellation ? Retournons en arrière, à une époque où le chant du coq réveillait les Genevois et Genevoises au milieu de la ville…
Selon le site de l’Etat dédié à la toponymie genevoise, le canton compte 67 lieux nommés en hommage aux oiseaux. Corneilles, mésanges, passereaux, perdrix… On trouve des rues avec des noms d’oiseaux sur tout le canton. Il y en a peu en Ville de Genève, mais beaucoup dans certaines communes de campagne, comme Pregny-Chambésy, où on en compte 7. La palme d’or revient à Thônex, avec un total de 15 rues sur cette thématique !
On retrouve également plusieurs mentions de chants d’oiseaux. Parmi eux, on compte le chemin de Chantecoucou à Veyrier, et celui de Chantemerle… à Thônex, évidemment ! Cependant, est-ce que le nom de Chantepoulet en ville est à rapprocher de toutes ces mélodies qui font partie de la campagne genevoise ?
Pour trouver l’origine du nom de la rue Chantepoulet, il faut remonter jusqu’au XVIe siècle. À cette époque, le bourg de Saint-Gervais est inclus dans l’enceinte des remparts de la cité, après son rattachement à Genève trois siècles auparavant. Entouré de domaines agricoles et relié à la ville uniquement par des ponts, Saint-Gervais conserve une identité campagnarde, avant de se densifier au XVIIe siècle avec l’arrivée de réfugiés protestants.
Lorsqu’au milieu du XVIe siècle Genève se fortifie, dressant des remparts autour de la cité, de nombreux bastions sont créés. Ceux de Saint-Gervais sont nommés en lien avec son aspect plus campagnard. En nommant l’un des bastions « Chantepoulet », on indique par cette appellation qu’à cet endroit, on entend chanter les coqs et les poules. Du lac à la porte de Cornavin, les habitants se réveillaient alors avec le chant des coqs.
Le terme de « chantepoulet » ne se retrouve pas uniquement en centre-ville. En pleine campagne genevoise, du côté de Confignon, il existe un autre chemin de Chantepoulet. Toutefois, celui-ci ne semble pas tenir ses origines d’un chant de coq…
Pour comprendre l’appellation de cette rue, il faut retourner un peu en arrière, à une époque où le patois genevois était bien plus répandu qu’aujourd’hui. Selon le Glossaire genevois de Gaudy-Le fort datant de 1820, « chantepoulet » est un terme qui désigne une fleur. Plus précisément, il qualifie le Dianthus carthusianorum, plus connu sous le nom d’œillet des chartreux. Ce n’est donc pas un oiseau, mais une fleur qui a nommé ce chemin…en pleine campagne !
Mots-clés: Animaux; Histoire Suisse et genevoise; Noms de rues
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Gaudy-Le Fort, Jean-Aimé, Blavignac, Jean-Daniel. Glossaire genevois. Genève, Slatkine, 2001.
« Nom de lieu : l’origine du nom Chantepoulet à Genève », Couleurs locales, RTS, émission du 11.03.2021. URL : https://www.rts.ch/play/tv/couleurs-locales/video/couleurs-locales?urn=urn:rts:video:12038325
Noms géographiques du canton de Genève : https://noms-geographiques.app.ge.ch/
Image 1 : Pixabay
Images 2 et 3: Photographies de l’auteure
Image 4 : Genève, 1841 (détail de l’image). Domaine public, Wikipedia Commons
Image 5 : Audrius Meskauskas, travail personnel. Dianthus carthusianorum, Schynige Platte (Interlaken), Suisse, 2007. Wikipedia Commons, CC BY-SA 3.0. https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=2530431