Un jour, une histoire

Que s’est-il passé le… ?

2 juin 1884

L’inauguration de la statue du Général Dufour

Peu de Genevois ont marqué autant l’histoire de leur ville et de leur pays que Guillaume Henri Dufour. Général des armées, cofondateur de la Croix-Rouge, ingénieur cantonal et cartographe, il a fait progresser la science et l’humanisme en Suisse. En 1884, moins de 10 ans après sa mort, une statue en son hommage est érigée au milieu de la Place Neuve. Genève célèbre l’évenèment en grandes pompes et devant une foule immense.

Les faits d’armes du Général

Né dans une famille genevoise en 1787, Guillaume Henri Dufour se tourne vite vers les deux domaines qui ont fait sa renommée : les sciences et l’armée. Il se forme militairement en France dès 1807, Genève étant française depuis 1798. Dès 1811, il sert dans l’armée française et se retrouve en garnison à Corfou. Il revient en Suisse en 1817 et quitte l’armée française (Genève ayant rejoint la Suisse en 1815). La même année, il intègre la nouvelle armée fédérale en tant que capitaine. Il devient lieutenant-colonel en 1820, colonel en 1827 et chef d’état-major en 1831.

C’est durant la Guerre du Sonderbund en 1847 que Dufour montre sa véritable puissance comme chef militaire. Il est en effet désigné comme général des troupes fédérales, et a la charge de dissoudre le Sonderbund. Ce nom désigne une alliance catholique entre sept cantons (Lucerne, Uri, Schwytz, Unterwald, Zoug, Fribourg et Valais) et le conflit armé qui les oppose au reste de la Suisse en novembre 1847. Les sept cantons conservateurs voient dans la montée du Parti Radical une menace vis-à-vis du catholicisme. Celui-ci a en effet mis en place des mesures anticatholiques, contre lesquelles se bat la ligue du Sonderbund.

Les tensions mènent à un conflit armé, opposant la ligue (84’000 hommes) contre le reste de la Suisse (102’000 soldats). Le nom de Dufour est resté célèbre comme Général des armées, car il a gagné la guerre en trois semaines, avec des pertes minimes (93 morts), démontrant à la fois son habileté diplomatique et sa grande humanité.

Dufour a participé à d’autres conflits armés impliquant la Confédération. Au total, il est nommé quatre fois Général de l’armée fédérale.

Inauguration de la statue Dufour

Ingénieur et cartographe

Attiré par les sciences, Dufour a étudié à l’École Polytechnique française puis à l’École d’application de l’artillerie et du génie de Metz. Lorsqu’il revient à Genève en 1817, il occupe le poste d’ingénieur cantonal. Il participe alors à plusieurs chantiers importants de la ville. L’aménagement du quartier des Bergues ou encore l’urbanisation de la Corraterie font partie de ces travaux.

La Confédération confie également un travail colossal à Guillaume Henri Dufour. Elle le charge de cartographier l’ensemble du pays. Cette mission, qu’il débute en 1833, l’amène à fonder en 1838 le Bureau topographique suisse. Réussite technique et artistique, cette carte paraît en 1865. Connue encore aujourd’hui sous le nom de «Carte Dufour», c’est la première carte topographique officielle du pays.

Inauguration de la statue Dufour

Humaniste et président de la Croix-Rouge

Toutes ces activités ne suffisent apparemment pas à Dufour pour remplir ces journées. Il est aussi à l’origine d’un projet humanitaire de taille. En effet, il est l’une des cinq personnalités genevoises fondatrices de la Croix-Rouge. Le 17 février 1863, il forme avec Henry Dunant, Gustave Moynier, Louis Appia et Théodore Maunoir un comité international de secours aux militaires blessés.

Ce sont les prémices de la Croix-Rouge, que les cinq hommes développent ensemble durant l’année 1863. Du haut de ses 75 ans, Guillaume Henri Dufour en devient le premier président, entre 1863 et 1864. Général respecté, il a effectivement l’allure et les talents oratoires pour s’adresser à une assemblée de délégués militaires lors de la première conférence internationale de la Croix-Rouge. Celle-ci, organisée en 1864, débouche sur la signature de la Convention de Genève.

Inauguration de la statue Dufour

Une célébration qui fait du bruit

Dufour meurt en 1875. Quelques années plus tard, un projet est mis en place pour lui rendre hommage, grâce à une statue équestre à son effigie. La ville l’inaugure en grandes pompes le 2 juin 1884. La Place Neuve, noire de monde, a attiré Genevois, Suisses et Français à ce grand évènement.

Le Journal de Genève a même sorti une édition spéciale pour l’occasion, dévoilant un dessin de la statue et rendant hommage au Général. En plus de l’histoire de toutes ses actions, le journal a retranscrit certains documents de la main de Dufour.

Il note aussi l’hommage extraordinaire rendu à cet homme, de la part d’une ville peu friande de statue. Avant Dufour, seul Rousseau avait eu le droit à cet honneur.

C’est à sa mémoire que nous allons rendre hommage aujourd’hui, en lui faisant le plus grand honneur qu’un peuple républicain puisse faire à l’un des siens, en lui érigeant une statue sur une de nos places publiques.
C’est un hommage dont le peuple genevois n’est pas prodigue, car il ne l’avait accordé jusqu’ici qu’à Jean-Jacques Rousseau, et il avait attendu pour le faire que l’illustre écrivain, […], fût mort depuis un demi-siècle.
Inauguration de la statue Dufour

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Sources

Journal de Genève, éditions du 02.06.1884 et du 03.06.1884

Tribune de Genève, éditions du 02.06.1884 et du 03.06.1884

Bibliographie

Abplanalp, Andrej. « Dufour – le général humaniste ». Blog du Musée national suisse, 09.11.2017. En ligne ici.

Langendorf, Jean-Jacques. « Guillaume Henri Dufour ». Dictionnaire Historique de la Suisse, 20.04.2006. En ligne ici

« Le Général qui aimait les sciences », Campus, UNIGE, n°117, 2014.

Images

Images 1, 4 et 5: Photographies de l’auteure

Image 2 : Guillaume Henri Dufour, Général de l’armée suisse durant la guerre du Sonderbund, 1847. Domaine public, Wikipedia Commons.

Image 3 : Portrait du Général Dufour par sa fille, Anne Octavie L’Hardy, née Dufour. Le Général portant l’ordre de la légion d’honneur. Après 1840.  Domaine public, Wikipedia Commons.

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