Genève, baignée par le lac Léman et le Rhône, a expérimenté divers systèmes pour approvisionner sa population en eau, depuis les puits et aqueducs romains jusqu’aux grandes installations hydrauliques des XIXe et XXe siècles. Les fontaines publiques, implantées dès le Moyen Âge, occupent à la fois un rôle utilitaire et symbolique. Elles conjuguent commodité, beauté et parfois sacralité, tout en étant un lieu de rassemblement.
L’histoire moderne de l’eau à Genève prend un tournant décisif au début du XVIIIe siècle avec la création de la première machine hydraulique conçue par Joseph Abeille (1709-1711). Elle permet d’alimenter un réseau de fontaines publiques. Ce réseau se perfectionne au fil des siècles, jusqu’à l’édification de l’usine des Forces Motrices de la Coulouvrenière dans les années 1880, véritable moteur de l’extension urbaine genevoise.
C’est dans ce contexte d’expansion et d’industrialisation que s’inscrivent les bornes-fontaines à tête de lion, qui deviennent dès 1843 un élément incontournable du paysage urbain.
Installées pour la première fois rue Rousseau et rue du Temple, ces fontaines à goulot orné d’une tête de lion se multiplient à partir de 1860, notamment à la faveur du développement de nouveaux quartiers. Elles étaient souvent placées en queue de conduite, c’est-à-dire à l’extrémité des canalisations, pour éviter la stagnation de l’eau. Aujourd’hui, seules 15 bornes conservent cette fonction technique, mais leur présence reste massive : 176 bornes recensées en 2017, dont 145 encore en fonte.
Ces fontaines, produites principalement par l’usine genevoise Kessler, arborent une gueule de lion d’où jaillit l’eau. L’esthétique de ces bornes allie robustesse fonctionnelle et symbolisme classique.
Menacées de suppression en 1929, les bornes à tête de lion ont survécu grâce à l’attachement des Genevois. Au fil des années, certaines bornes ont été modernisées avec des boutons-poussoirs ou remplacées par des modèles en inox. Mais leur nombre a continué à croître, notamment avec des installations nouvelles en 1995 et 1999. Aujourd’hui, elles sont aussi un indicateur de la qualité de l’eau, régulièrement testée par les Services industriels.
Les bornes à tête de lion ne sont pas une exclusivité genevoise. Des modèles similaires, souvent issus de la fonderie Kessler, se retrouvent à Lausanne, Lyon, et dans d’autres villes d’Europe. À Lausanne, certaines bornes sont même ornées des armes de la ville, témoignant de la circulation des formes et des savoir-faire industriels à la fin du XIXe siècle.
La réponse sous les images!
À la rue des Grottes
Sur la plaine de Plainpalais
Sur la Place des Bergues
À la rue Le-Fort
À la gare des Eaux-Vives
À la rue Dumas
Dans le passage Burlamachi (derrière le Musée d’art et d’histoire)
Sur l’Île Rousseau
À la promenade de l’Observatoire
N’hésitez pas à me dire combien de fontaines vous avez reconnues!
Vous voulez connaître l’histoire d’un autre monument?
Isabelle Brunier. Les Monuments d’art et d’histoire du canton de Genève, tome IV, Genève espaces et édifices publics. SHAS, 2016. En ligne ici.
« Je cherche des informations sur les bornes-fontaines à tête de lion. Combien sont-elles et est-il possible de toutes les localiser ? ». 14.05.2024. En ligne ici.
« Pourquoi les bornes-fontaines genevoises sont-elles décorées avec des têtes de lions ? ». 06.05.2024. En ligne ici.
Photographies de l’autrice.